L’histoire des retraites montre la complexité de ce sujet. La retraite dépend de la démographie, de l’évolution économique et monétaire, et de la volonté politique. Et l'histoire des retraites des enseignants dans tout ça ?
Au commencement, il n’y avait rien… ou pas grand’chose
Pendant longtemps, le sort des vieux sans ressources et sans famille n’a relevé que de deux choses. De la charité, à l’initiative d’organismes religieux, ou de la solidarité, à l’initiative par exemple des corporations pour leurs membres.
XVIIème siècle : début de l’Histoire des retraites
1671 : Henri IV se préoccupe des anciens soldats et Louis XIV fait construire pour eux l’Hôtel des Invalides.
1673 : Colbert institue une pension de retraite pour les marins (Enim). Aussi étonnant que cela puisse paraître, le plus ancien régime de retraite est celui de la Marine. En effet, devant le peu de volontaires, le recrutement dans la marine se faisait parfois de façon violente, les marins étaient embarqués de force dans les ports.
1698 : Création du régime de retraites de la Comédie Française
Fin XVIIIème siècle : début de l’Histoire des retraites des enseignants
1768 : L’histoire des retraites des fonctionnaires de l’État débute sous l’Ancien Régime. Création de la Caisse de retraite de la Ferme générale (service de collecte des impôts sous la royauté).
Août 1790 : La Révolution apporte sa contribution sous la forme d’une loi qui crée le premier régime des fonctionnaires de l’État. Son champ d’application englobe pensions civiles, ecclésiastiques et militaires. Ces dernières sont modifiées par des lois de 1831.
1795 : En créant le maillage des écoles « centrales » – une au centre de chaque département, la Convention (l’assemblée constituante qui créa la première République) accorda aux enseignants de ces établissements une retraite égale au traitement de leur dernière année d’enseignement après vingt-cinq ans de service.
1800 : À la place des écoles centrales, furent institués les lycées, et, pour leurs professeurs, une pension égale aux trois quarts de leur dernier traitement après trente ans de service. L’Empereur avait même songé à créer pour eux une maison de retraite sur le modèle de l’hôtel des Invalides…
XIXème siècle
Première moitié du XIXè
1802 : Pour les professeurs, après une ébauche sous la Révolution, un fonds de retenue du vingtième des traitements est créé pour assurer une pension de retraite, qu’ils peuvent toucher après vingt ans ou trente ans d’exercice.
1808 : Création de la caisse de retraite de la Banque de France
1831 : loi sur les pensions militaires
1833 : la loi Guizot crée dans chaque département une Caisse d’épargne et de prévoyance pour les instituteurs. Elle gère une retenue du vingtième du traitement fixe ; mais comme celui-ci n’est alors qu’une petite partie des ressources des maîtres, le reste provenant de l’écolage, et que L’État n’ajoute rien à ces retenues, la pension reste très maigre.
2 juin 1850 : création d’une Caisse nationale de retraite vieillesse (CNRV) gérée par la Caisse des dépôts et consignations (système par capitalisation à adhésion facultative). Elle recueille les versements volontaires des particuliers, et leur sert à partir de 50 ans une rente qui est garantie par l’État (à cette époque, la monnaie est stable !). Mais cette caisse intéressera surtout la petite bourgeoisie, les ouvriers n’ayant pas les moyens de cotiser.
Deuxième moitié du XIXè
1853 : loi sur les pensions civiles des fonctionnaires de l’État. Cette loi affirme les principales règles qui fondent encore aujourd’hui le régime de retraite des fonctionnaires civils, notamment la pension de réversion. En effet, suivant le schéma social de l’époque, l’homme devait pourvoir aux besoins de sa famille, et de son épouse en premier lieu. Il s’agit de remédier à l’extension non maîtrisée des caisses spéciales de retraite qui induisent de « choquantes inégalités dans la situation des fonctionnaires », « l’uniformité est substituée à des règles arbitraires ». Elle peut être versée à partir de 60 ans et après 38 années de services ; mais il ne s‘agit pas encore d’un droit, et pendant longtemps, les fonctionnaires partiront en retraite plus tard, certains même à 80 ans ; un tiers de la pension est reversé à la veuve.
Cette loi distingue les services « actifs » (postes, douanes, forêts, contributions indirectes, tabacs) qui permettent le départ à 55 ans, et les services« sédentaires » où il faut attendre 60 ans. La retraite est calculée à partir de la moyenne des traitements des six dernières années d’exercice : 1/50 par année de service pour les « actifs », 1/60 pour les « sédentaires ». Les professeurs sont classés parmi les « sédentaires ».
1876 : les instituteurs sont classés dans les services actifs ; leurs conditions de travail à l’époque le justifiaient, mais tous les personnels de l‘enseignement primaire, comme les directeurs, économes et professeurs des écoles normales, dont on ne saurait dire la même chose, bénéficient avec eux de cet avantage important !
1883 : l’Allemagne de Bismarck crée le premier système obligatoire de retraites, financé par la capitalisation de cotisations ouvrières et patronales, pour une retraite à 70 ans.
1886 : deuxième loi régissant la Caisse nationale de retraite vieillesse (CNRV)après celle de 1850
1889 : Sept ans après les grandes lois ferrystes de 1881 et 1882 instituant l’obligation d’instruction primaire ainsi que la gratuité et la laïcité des écoles communales, les instituteurs et institutrices enseignant dans les écoles communales deviennent fonctionnaires d’État. Pour la retraite, ils sont classés parmi les « actifs ».
1894 : loi créant le régime de retraite des Mines
La première moitié du XXème siècle : les débuts
1909 : loi créant le régime de retraite des chemins de fer
1910 : les différences sont très sensibles pour tous les enseignants entre le début et la fin de leur carrière (comme aujourd’hui), mais aussi entre les différentes catégories d’enseignants.
Ainsi, Antoine Prost le relate dans Histoire de l’enseignement en France. En fin de carrière, un agrégé de Paris gagne 4,3 fois plus qu’un instituteur. Les instituteurs pouvaient certes prendre leur retraite dès 55 ans (contrairement aux professeurs du secondaire à 60 ans), mais elle était bien plus faible compte tenu de leurs traitements (même en fin de carrière) beaucoup plus bas.
1910 : loi sur les retraites ouvrières et paysannes, retraite par capitalisation par prélèvement sur le salaire. Le niveau de vie misérable des ouvriers ne les incite pas à cotiser pour leurs éventuels vieux jours.
1914 : Finalement, comme l’a bien mis en évidence l’historien anglais Théodore Zeldin dans son Histoire des passions françaises :
« En 1914, les instituteurs d’Alsace-Lorraine (alors sous souveraineté allemande) recevaient un salaire deux fois plus élevé que celui de leurs collègues français et, dans une enquête internationale, les enseignants du primaire en France furent classés comme les plus mal payés d’Europe, venant à la vingt-cinquième place, à égalité avec ceux du Monténégro. »
1914 : Création du régime de retraites de l’Opéra de Paris
1919 : Naissance de la CFTC qui deviendra la CFDT en 1964
14 avril 1924 : loi modifiant le calcul de la retraite des agents de l’État.
Il n’est plus établi à partir de la moyenne des traitements des six dernières années de service, mais des trois dernières années. Elle institue le droit de partir à 60 ans, avec une pension égale à la moitié du traitement (les trois cinquièmes pour les petits traitements). Les principes de 1853 ont tous subsisté, mais leurs modalités sont souvent amendées dans un sens favorable aux pensionnés. Par exemple, la liquidation des pensions de réversion passe à un taux de 50 % de la retraite vieillesse ou d’invalidité à la réversion.
Des dispositifs à orientation nataliste marquée ont été décidés à cette même date : bonification pour enfants pour les femmes fonctionnaires, retraite anticipée pour les mères de trois enfants et majoration des pensions pour les fonctionnaires ayant élevé trois enfants. Cette même loi de 1924 instaure un régime commun aux fonctionnaires civils et militaires, les militaires ayant bénéficié depuis 1831 d’un droit à pension.
1928 : loi créant le régime de retraite des ouvriers de l’État
30 avril 1930 : création des assurances sociales, avec une section retraite obligatoire par capitalisation pour les salariés du secteur privé. Les droits ne sont acquis sur les salaires soumis à cotisation qu’à partir de juillet 1930. La pension pleine étant acquise après 30 ans de cotisation, elle ne pouvait donc atteindre son plein effet qu’en 1960.
1937 : Fondation du Sgen en tant que syndicat national par trois universitaires : Guy Raynaud de Lage, François Henry et Paul Vignaux. Bien que statutairement laïque dès l’origine, il choisit alors de rejoindre la CFTC plutôt que la CGT mais ses fondateurs militent au sein de la tendance Reconstruction pour la déconfessionnalisation de la centrale chrétienne. Celle-ci devient effective en 1964, lorsque la CFTC vote sa transformation en CFDT.
1941 : Des difficultés financières conduisent à l’abandon du système de la capitalisation au profit du système par répartition : l’inflation massive ne permettait plus de préserver le pouvoir d’achat des retraités. La loi de 1941 combina le régime des assurances sociales avec celui de l’allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS), pour venir en aide aux anciens salariés qui ne disposaient pas de ressources suffisantes.
4 octobre 1945 : loi qui institue le caractère obligatoire de l’assurance-vieillesse par répartition pour tous les salariés dans le cadre de la sécurité sociale. Elle remplace le régime créé en 1941. Le nouveau régime s’inscrit dans la continuité des assurances sociales en matière de retraite. Mais il se heurte alors à la résistance générale de tous ceux qui n’adhéraient pas à ces régimes d’assurances sociales. Il s’agit :
- des bénéficiaires des régimes spéciaux plus avantageux (qui obtiennent à titre provisoire, puis définitif, le maintien de leur régime) ;
- le monde agricole, salarié et non-salarié, dont le régime géré par la Mutualité sociale agricole, est maintenu ;
- les « non-non » ou non-salariés non agricoles.
1947 : Création de l’Agirc, retraite complémentaire des cadres.
20 septembre 1948 : Loi qui améliore l’ensemble du système des pensions de la fonction publique d’État. La pension de réversion alors instituée a des modalités encore en vigueur avant janvier 2004, notamment avec un droit plafonné pour les veufs de femmes fonctionnaires. Cette loi apporte de nouveaux aménagements aux règles applicables aux pensions des fonctionnaires de l’État. En particulier, elle pose le principe de l’adaptation automatique des pensions aux traitements d’activité. La pension correspond alors à 2 % du traitement indiciaire des six derniers mois par annuités liquidées, dans la limite de 37,5 annuités, soit 75 %.
1949 : Les non-non créent leurs propres régimes de retraite : la Cancava pour les artisans, l’Organic pour les commerçants et industriels (fusionnés dans le RSI) et la CNAVPL pour les professions libérales, elle-même fédération de 13 sections professionnelles.
La seconde moitié du XXème siècle : les améliorations
8 décembre 1961 : Création de l’Arrco (Association des régimes de retraites complémentaires). Les régimes complémentaires ne sont obligatoires que pour les entreprises adhérentes au syndicat patronal signataire ou engagées par une convention collective étendue. Il rend la retraite complémentaire obligatoire pour les salariés de toutes les entreprises relevant du champ d’activité du Centre national du patronat français (CNPF).
1968 : la CFDT obtient la reconnaissance des sections syndicales d’entreprise. Comparant son combat pour la démocratie à celui des salariés en entreprise, la CFDT soutient dès
le 6 mai la grève étudiante. Elle obtient la reconnaissance du syndicalisme d’entreprise lors des
négociations de Grenelle. Une conquête fondamentale puisqu’elle est à l’origine de la création des
sections syndicales d’entreprise.
31 décembre 1971 : Loi Boulin. Les principales améliorations apportées au régime général sont issues de cette loi. Le taux de liquidation à 60 ans passe de 20 à 25 %, avec majoration de 5 % au lieu de 4 % par année après 60 ans, pour atteindre 50 % à 65 ans. Parallèlement, elle porte la durée d’assurance requise pour la pension complète de 30 à 37,5 ans (120 à 150 trimestres).
Fin 1972 : Réversion améliorée. La liquidation des pensions de réversion devient possible à partir de 55 ans au lieu de 65 ans. Rappelons qu’en 1945, la pension de réversion était réservée au conjoint à charge, donc sans aucun revenu. En 1971, une condition de ressources est substituée à la notion de conjoint à charge.
Fin 1972 : Droit à pension, même si peu cotisé. Un décret institue le calcul de la pension sur la base des 10 meilleures années et non plus sur les 10 dernières.
1974 : Création de l’Agirc. Le premier accord syndicats-patronat crée l’Agirc, dans la convention collective interprofessionnelle pour les cadres de l’industrie et du commerce du 14 mars 1947. Dès 1950, des régimes complémentaires de même nature sont créés pour les catégories non-cadres. L’innovation fondamentale consiste à abandonner la technique de capitalisation au profit de la répartition, qui permet ainsi de valider – gratuitement pour les intéressés – toutes les carrières accomplies avant l’adhésion des entreprises aux régimes complémentaires.
Jusqu’en 1975, aucun cumul n’était admis entre une pension de réversion et une pension personnelle. La possibilité de les cumuler, dans certaines limites, date de 1975.
3 novembre 1975 : La loi supprime la durée minimum d’assurance pour avoir droit à une pension. Dorénavant, un trimestre cotisé donne droit à une pension. La même loi porte à deux ans par enfant la majoration de durée d’assurance.
30 décembre 1975 : La loi permet à des travailleurs manuels ayant subi des travaux pénibles et aux assurées mères de famille d’obtenir, dès 60 ans, une pension de vieillesse calculée au taux plein.
1er juillet 1977 : La loi accorde aux femmes comptant 150 trimestres le bénéfice de la pension au taux plein de 50 %, dès l’âge de 60 ans.
26 mars 1982 : Lois Auroux – Retraite à 60 ans. Elles s’inspirent des propositions de la CFDT. Elles représentent des avancées significatives pour la défense des droits des salariés. Ainsi, elles ont fortement modifié le droit du travail : interdiction de toute discrimination ; obligation de négocier des accords collectifs dans l’entreprise sur les salaires, sur la durée et l’organisation du travail, sur l’égalité homme-femme ; développement des institutions représentatives du personnel ; création d’un droit d’expression des salariés sur les conditions de travail ; création du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT). L’ordonnance généralise la possibilité de bénéficier de la retraite à taux plein à 60 ans (au lieu de 65 ans) pour les hommes et les femmes comptant 150 trimestres validés, soit 37,5 années, tous régimes confondus. Ce taux plein de 50 % des années cotisées était déjà acquis et le demeure pour certaines situations dérogatoires : invalidité, inaptitude au travail, anciens déportés, anciens combattants ou prisonniers de guerre, travailleurs manuels, ouvrières mères de famille.
31 mai 1983 : loi créant le minimum contributif pour les liquidations de pensions au taux plein de 50 % après le 31 mars 1983.
4 février 1983 : Accord retraites complémentaires. La loi de 1982 visant la retraite à 60 ans dans le régime général de sécurité sociale ne peut prendre son plein effet que si les régimes complémentaires s’alignent. Après de longues hésitations, l’accord de 1983 intervient également dans ce sens, mais en faisant intervenir un dispositif particulier baptisé « association pour la structure financière » (ASF). Ce dispositif financier n’avait pas un caractère définitif et il fait l’objet, depuis, de reconductions successives, acquises par des actions et de laborieuses négociations. C’est le cas, notamment en janvier 2001, après la dénonciation de l’accord sur le financement de la retraite à 60 ans (son nom a changé pour AGFF).
À partir de décembre 1986 : Mensualisation des pensions de base. À l’origine, les pensions du régime général sont versées à la fin du trimestre. L’action syndicale permet d’obtenir le versement mensuel, puis d’étendre progressivement à tous les autres régimes de sécurité sociale. Dans les régimes complémentaires Arrco comme Agirc, la pension étant versée d’avance en début de trimestre, la mensualisation n’est intervenue qu’à partir de janvier 2014.
24 avril 1991 : Livre blanc sur les retraites. Le déficit du régime général de la sécurité sociale relance le débat sur les retraites. Michel Rocard alors Premier Ministre fait publier le « Livre Blanc sur les retraites ». Ce document prospectif alertait l’ensemble de la société sur l’impact du « papy-boom ». Il présente la situation de l’ensemble des régimes de retraite et leurs perspectives d’évolution. Il dénombre 130 régimes de retraite ! Le constat était sans appel : si l’on voulait maintenir le niveau des pensions sans réforme, les cotisations devaient doubler d’ici 2040, ou au moins progresser de 50% dans le scénario le plus favorable. Le rapport précisait en outre que les besoins de financement augmenteraient très fortement et brusquement après 2005. Michel Rocard est remercié peu après. Ses succeseurs n’entameront pas quoi que ce soit.
À l’aube du XXIè siècle, les réformes s’enchaînent… avec plus ou moins de heurts…
22 juillet et 27 août 1993 : Réforme Balladur. L’évolution continue favorable décrite ci-dessus est contrariée. Après la déroute électorale du PS lors des législatives de 1993, la droite dispose d’une écrasante majorité à l’Assemblée. Elle va se saisir du dossier. En juillet 1993, Edouard Balladur fait adopter la première réforme paramétrique :
• Passage de 37,5 ans à 40 ans de 1994 à 1999 pour liquider une retraite à taux plein,
• Maintien de la décote de 10% par année manquante,
• Augmentation du nombre des meilleures années prises en compte pour le calcul de la retraite, qui passe de 10 à 25 de 1993 à 2008,
• Désindexation des pensions sur les salaires. Elles évoluent depuis au gré de l’inflation.
Cette réforme adoptée durant l’été ne concerne QUE les salariés du privé. Ceux du public peuvent continuer à liquider leur pension au bout de 37,5 ans.
Cette réforme est dévastatrice car elle va freiner durablement l’évolution des pensions et contribuer à leur baisse relative avec le changement de mode de calcul. Ainsi, une pension de base liquidée en 2010 pourra être inférieure de 20 % à une pension liquidée dans les conditions d’avant 1987, pour une carrière complète et par comparaison avec l’évolution du salaire moyen brut.
1993 également : pour alléger le régime général de retraite, le Fonds de solidarité vieillesse prend en charge les dépenses de solidarité : minimum vieillesse, majoration de pension pour enfants ou conjoint à charge, validation de périodes de service national ou de chômage.
1993, 1994 et 1996 : Réformes dans les régimes complémentaires. Les différents accords patronat-syndicats généralisent les taux contractuels de cotisations à l’Arrco de 6 % sur la tranche A du salaire (jusqu’au plafond de la sécurité sociale) et de 16 % sur la tranche B du salaire (partie supérieure au plafond). Des modifications du rendement anticipent les problèmes de financement.
1995 : Échec du plan Juppé Alain Juppé, Premier Ministre du nouveau Président (Jacques Chirac) décide de procéder à une réforme du financement de la Sécurité Sociale et en profite pour réformer les régimes dits spéciaux (comme la RATP et la SNCF). Il s’ensuit un mois de paralysie totale des transports en décembre 1995 et des manifestations importantes qui contraignent Alain Juppé à retirer son projet.
1995 : la CFDT soutient la réforme de la Sécurité sociale
L’histoire est complexe, le progrès est indéniable : on est passé, entre 1975 et 1995, d’une société où les retraités étaient relativement pauvres à une société où ils sont relativement aisés ; le niveau de vie des ménages de plus de soixante ans a dépassé celui des moins de soixante ans.
1999 : Création du Fonds de réserve pour les retraites. Cet instrument sert à faire face aux situations de déséquilibre entre cotisations et pensions à payer.
Les années 2000 : histoire des retraites = histoire de réformes
Mai 2000 : Conseil d’orientation des retraites (COR) mis en place par le gouvernement Jospin pour attirer l’attention des partenaires sociaux sur l’évolution et l’équilibre des régimes de retraite face au choc démographique annoncé à partir de 2005. Sa mission est d’établir un diagnostic et de réaliser des projections financières pour les différents régimes.
2001 : Premier rapport du COR. Le gouvernement Raffarin confirme, en 2002, le Cor dans sa mission d’analyse et de propositions à moyen terme.
2002 : La prestation spécifique dépendance créée en 1997 devient allocation personnalisée d’autonomie (APA).
21 août 2003 : Réforme Fillon. Le choc de 2002 a porté au pouvoir Jacques Chirac pour un second mandat. Celui-ci charge François Fillon de négocier une nouvelle réforme qui doit concerner le public celle-là et aussi le privé (mais dans une moindre mesure).
La CFDT participe à la concertation sur les retraites et obtient le maintien de la référence aux 6 derniers mois pour le calcul de la retraite des fonctionnaires et le dispositif « carrières longues ». Cet accord a permis a plus de 600 000 salariés ayant commencé à travailler tôt de partir à la retraite avant 60 ans.
Insuffisamment partagée et expliquée, la stratégie de négociation de la CFDT et le bilan de sortie de négociation sont mal compris par une partie des militant·es et des adhérent·es.
Et pourtant…
Et pourtant… 17 ans après, plus personne n’évoque la capitalisation.
Le décret « carrières longues » a déjà permis à un million de personnes de partir avant l’âge légal… Des salariés qui ont commencé à travailler entre 14 et 20 ans et cotisé suffisamment de trimestres avant l’âge légal.
De 2007 à 2010, de nouvelles dispositions ont été prises chaque année dans la loi de financement de la sécurité sociale :
- report de la mise à la retraite d’office par l’employeur à 70 ans pour le régime général ;
- majoration de la surcote par deux fois ;
- relèvement à 1,6 fois le Smic du plafond de rémunérations permettant le cumul emploi-retraite, puis suppression de toute limite sous conditions de liquidation de la retraite ;
- durcissement des conditions de rachat de trimestres au titre des années d’études et d’apprentissage ;
- durcissement des conditions d’accès au départ anticipé pour carrière longue et pour les assurés handicapés ;
- prise en compte des règles en vigueur à l’âge de 60 ans et non à celles de l’année de liquidation ;
- allongement de la durée de cotisation pour la retraite à taux plein à 60 ans, passage progressif à 164 trimestres en 2012, avec évolution parallèle de la durée d’assurance requise pour le calcul de la pension ;
- non-prise en compte pour le départ anticipé carrière longue du rachat de trimestres pour études supérieures et années incomplètes ;
- réforme de la majoration de la durée d’assurance pour enfants (janvier 2010) ;
- réintroduction de la limite d’âge à 55 ans, pour la pension de réversion dans le régime général et les régimes alignés ;
- revalorisation générale des pensions de base au 1er avril de chaque année ;
- accès au minimum contributif majoré si 120 trimestres cotisés.
9 novembre 2010 : Réforme Woerth. La crise de 2008-2009 a provoqué de nombreux soubresauts et surtout une augmentation de l’endettement étatique doublée d’une récession.
Nicolas Sarkozy en profite pour faire adopter une nouvelle réforme malgré des manifestations importantes et nombreuses. La CFDT se mobilise contre cette réforme des retraites. La CFDT lutte contre les inégalités de la réforme qui reporte l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans et durcit les conditions du dispositif « carrières longues ». Qualifiée d’injuste par la CFDT, elle n’épargne aucun salarié, en particulier ceux aux carrières les plus longues dont l’espérance de vie en retraite est la plus faible. Les reculs des âges de départ en retraite et de l’obtention du taux plein constituent le cœur de la loi sur les retraites. Le texte confond également pénibilité et incapacité de travail. Les principales modifications sont les suivantes :
- recul de l’âge légal de 60 à 62 ans (et conséquemment de 65 à 67 pour la fin de la décote) ;
- mesures restrictives pour les fonctions publiques (retraites anticipées pour enfants supprimées, cotisations augmentées, minimum sous conditions, traitement continué supprimé, CPA supprimée) ;
- passage de 15 à 17 ans de durée de service pour bénéficier des services actifs,
- fin du dispositif de validation pour les contractuels qui deviennent titulaires,
- durcissement du minimum garanti,
- départs anticipés pour carrières longues maintenus, mais recul de l’âge ;
- prise en compte de la pénibilité, mais seulement pour ceux frappés d’incapacité permanente suite à accident du travail ;
- extension du droit à l’information des assurés ;
- nouveau pilotage du système des retraites (Copiror) concurrençant le Conseil d’orientation des retraites (Cor) ;
- ajustement de la durée d’assurance ouvrant droit à taux plein maintenu : rapport entre la durée d’assurance pour le taux plein et la durée moyenne de temps de retraite (soit 2/3 pour la durée d’assurance et 1/3 pour la durée moyenne de retraite).
Janvier 2014 : Réforme « Touraine ». Suite à des alertes du Conseil d’orientation des retraites (COR), François Hollande fait adopter une réforme paramétrique mais de moindre ampleur que les précédentes :
- augmentation progressive des cotisations (des salariés et des employeurs);
- allongement progressif de la durée d’assurance de 42 à 43 ans à partir de la génération 1973. La CFDT a obtenu que les efforts demandés en matière de durée en trimestres soient limités, équitables et dans le prolongement des règles définies en 2003 ;
- mise à contribution des retraités. Ils sont appelés à participer aux efforts par le report de la revalorisation des pensions de retraite d’avril à octobre et par la fiscalisation de la majoration de pension pour enfants.
- pérennisation du décret « carrières longues »
Comme les précédentes, elle promet d’assurer durablement la sauvegarde du système des retraites. Cette réforme gage sur un équilibre financier en 2020 et une stabilité durable à l’horizon 2040. Contrairement à la réforme de 2010, elle n’a pas suscité de profond mécontentement. Même si, selon les sondages, elle n’a pas convaincu la très grande majorité des Français.
2018 : Carte des retraites Cette infographie présente l’organisation des régimes de retraite en France. Elle est réalisée par la communication d’Agirc-Arrco. Cet excellent schéma montre la complexité du système de retraite français avec ses nombreux régimes. Cette complexité pénalise les pluripensionnés.
2020 : une première tentative d’Emmanuel Macron
La réforme paramétrique universelle par points : Chronologie de la réforme annoncée par Emmanuel Macron
Sur notre site, Sgen-CFDT des Pays de Loire :
Le Sgen-CFDT, toujours force de propositions
Retraites : s’y retrouver entre infos et intox
Sur le site du Sgen-CFDT national :
Réforme des retraites et revalorisation à l’Éducation nationale
La revalorisation des salaires doit concerner tous les personnels
Avec :
[Vidéos] Retraites : à quoi devrait ressembler le futur système ?
[Vidéo] Réforme des retraites : ce que veut la CFDT
2022-2023 : L’histoire continue
Virage à 180° fait par Emmanuel Macron par rapport aux propositions de 2020…
Appel intersyndical à une première journée de mobilisation le 19 janvier suite aux annonces :
- report de l’âge légal de départ à 64 ans
- durée de cotisation pour partir à taux plein passera à 43 annuités dès 2027
Vous êtes né·e | Âge légal de départ | Durée de cotisation pour partir à taux plein | Âge du taux plein quel que soit le nombre de trimestres |
avant le 1/9/0961 | 62 ans | 168 trimestres soit 42 années | 67 ans |
à partir du 1/9/1961 | 62 ans et 3 mois | 169 trimestres soit 42 années et 3 mois | 67 ans |
en 1962 | 62 ans et 6 mois | 169 trimestres soit 42 années et 3 mois | 67 ans |
en 1963 | 62 ans et 9 mois | 170 trimestres soit 42 années et 6 mois | 67 ans |
en 1964 | 63 ans | 171 trimestres soit 42 années et 9 mois | 67 ans |
en 1965 | 63 ans et 3 mois | 172 trimestres soit 43 années | 67 ans |
en 1966 | 63 ans et 6 mois | 172 trimestres soit 43 années | 67 ans |
en 1967 | 63 ans et 9 mois | 172 trimestres soit 43 années | 67 ans |
à partir de 1968 | 64 ans | 172 trimestres soit 43 années | 67 ans |
Page du site de la CFDT sur la réforme des retraites 2023 avec ses tracts :
Pour aller plus loin…
Un article de Jacques George sur les Cahiers Pédagogiques
En savoir plus sur le site CFDT Retraités
Histoire des retraites enseignantes sur The Conversation