J’ai découvert il y a 5 ans une grille de lecture qui m’a beaucoup aidé à mieux accueillir les autres, leurs organisations et leurs habitudes, mais aussi à me réconcilier avec certains de mes fonctionnements.
Cette grille, c’est la Spirale Dynamique de Clare Graves. En voici quelques principes…
On n’a jamais fini d’apprendre
Sauf en cas d’accident cérébral ou autre, un être humain peut apprendre tout au long de sa vie, jusqu’à sa mort ! Ainsi, Clare Graves montre que non seulement on passe des phases de maturité pendant son enfance, jusqu’à l’adolescence (jusqu’ici, Piaget et d’autres l’avaient déjà observé) mais que cela peut continuer à l’âge d’adulte. Autrement dit, bonne nouvelle : si physiquement vous cessez de grandir, spirituellement, ça peut ne jamais s’arrêter.
Valeurs profondes vs valeurs de surface
Une des grandes propositions de cette grille de lecture, c’est d’observer que nos comportements, nos réactions sont pilotées par des valeurs profondes dont nous n’avons pas forcément conscience et que nous pouvons habiller de valeurs de surface. Un exemple pour bien comprendre : certaines personnes s’étonnent qu’une partie de nos compatriotes puissent passer d’un vote France Insoumise à un vote Rassemblement National. Or, vous avez là un exemple typique de valeurs de surface qui ont l’air totalement opposées, mais qui se retrouvent en fait sur une valeur profonde : la recherche d’une Vérité simple qui explique le monde, vous fournit un bouc émissaire et vous rassure (caricaturons : dans le premier cas, les salauds, c’est les riches, dans le deuxième, les étrangers). On peut en fait retrouver le même dogmatisme sur tout l’échiquier politique, pensons par exemple aux écologistes fraîchement convertis qui peuvent devenir des ayatollahs antispécistes, anti-viande, anti-gâchis, … Même phénomène pour les complotistes qui pensent dénoncer une kabbale ourdie par un groupe mondial secret, mais pour retomber dans un nouveau dogmatisme du même acabit que celui qu’ils dénoncent…
La psychogénèse récapitule la sociogénèse
Gageons que si j’avais retenu ce titre, vous ne seriez jamais arrivé·e jusqu’ici dans votre lecture, voire vous auriez fait demi-tour illico… Alors, qu’est-ce que ça veut dire en langage courant cette affaire ? Don’t panic, regardez ce générique de dessin animé et vous pourrez désormais parader en soirée en affirmant d’un air blasé : “oui, c’est parce que la psychogénèse récapitule la sociogénèse !”…
Résumons : lorsque vous arrivez au monde, vous repassez par toutes les phases par lesquelles sont passées les civilisations qui vous ont précédé (vertigineux, non ?). Ainsi, dans le ventre de votre mère, vous étiez un têtard, puis vous naissez fragile comme un homme préhistorique à la merci des dangers qui l’entourent, inconscient de sa séparation avec le monde. Vous évoluez progressivement vers un petit être barbare qui veut s’emparer de tout ce qui l’attire, sans supporter la frustration (la fameuse « période du non »), puis vous canalisez (ou pas) cette impulsivité pour atteindre l’âge de raison (des Lumières ?) et une maturité plus “scientifique”, etc.
La France est bleue comme une orange
Une fois ceci posé, où en est donc la valeur profonde de “la France” ? Car Clare Graves a montré que les groupes humains (du couple à la Nation) pouvaient, eux aussi, passer par ces différentes phases d’évolution. Eh bien, on peut dire que dans la culture française, c’est le stade orange qui émerge avec encore une grosse dominante de bleu. Concrètement, on a pu l’observer dans la gestion de crise actuelle : un fonctionnement pyramidal descendant (on attend que Jupiter and co décident) qui permet peu d’agilité, des décideurs (je ne féminise pas volontairement…) qui souhaitent apparaître infaillibles et sortent les parapluies à tous les niveaux, une incapacité à affronter l’incertitude et à reconnaître ses erreurs, un système infantilisant de type “carotte/bâton” pour que tout le monde reste chez soi (la peur du gendarme…).
Un exercice pour terminer (prof un jour…)
Lors de la rentrée scolaire 2020, nos ministres français ont déclaré : « On est prêt à tout » La ministre belge a déclaré de son côté : « Je ne m’attends pas à une année facile ». Quelles sont les valeurs profondes de ces deux ministres ?
Quelques précisions sur cette schématisation :
– le passage d’un stade à l’autre tel qu’il est présenté pourrait laisser entendre que ce développement se ferait de manière linéaire et irrémédiable. Or notre évolution est faite de sauts de compréhension, d’intuitions, de régressions, de boucles rétroactives, et autres, et ce modèle propose une vision holarchique de notre développement. L’expression consacrée est la suivante : « chaque niveau transcende et inclus le précédent ». Ainsi nous passons forcément par chaque stade mais les stades précédents « restent en nous » en quelque sorte.
– Le stade vert a l’air d’un stade complètement pacifique et en symbiose avec le groupe mais il s’agit en fait d’une étape « égalitariste » pendant laquelle on recherche certes l’harmonie MAIS au sein de son groupe d’appartenance et en ayant beaucoup de mal à tolérer les stades précédents.
Envie d’en savoir plus ?
Venez à la source… https://spiraledynamique.com/Theorie/