Le Sgen-CFDT Pays de Loire à l’écoute des écoles REP+

Après la relance de l'éducation prioritaire en 2014, le Sgen-CFDT pays de la Loire, se propose de faire un point de bilan avec quelques écoles REP+ ayant pu bénéficier de certaines mesures présentées dans le référentiel éducation prioritaire.
La volonté est de donner la paroles aux acteurs.

Après deux ans, quel bilan de la mise en place des REP+?

En 2014, lors de la relance de l’Education Prioritaire, le ministre annonçait … « Le plan de refondation de l’éducation prioritaire (…) centré sur la pédagogie, permettra aux équipes pédagogiques de bénéficier d’une formation plus complète, de voir leur travail en équipe facilité et leur engagement professionnel mieux reconnu ».http://www.education.gouv.fr/cid76427/refonder-education-prioritaire.html

Plus de deux ans se sont écoulés depuis le lancement de ce référentiel auquel s’est ajouté, des nouveaux programmes, le tout dans un contexte socio-économiques assez complexe.

Le Sgen-CFDT Pays de la Loire souhaite faire le point, avec les collègues des réseaux REP+ . L’enjeu est de mesurer la réalité de leurs conditions de travail, d’évaluer ce qui apparaît comme des points d’appui dans ce dispositif REP+. Et d’ appuyer leurs revendications pour viser à la fois une réelle diminution des inégalités, et un bien-être au travail.

Dans des écoles REP+ du quartier Est de Nantes : quelques points forts de la relance de l’éducation prioritaire à confirmer

La scolarisation des moins de 3 ans :

Ce dispositif est en effet perçu comme un point central de la réduction des inégalités. Les suivis d’élèves ayant pu être accueillis avant 3 ans, montrent à quel point les progrès faits, notamment dans la maîtrise de la langue, et la prise de repères dans l’espace scolaire, les aident dans la poursuite de leur scolarité.

►Les collègues pensent qu’il faut être particulièrement vigilants sur les capacités d’accueil, le taux d’encadrement, et la mise à disposition de locaux suffisants et adaptés aux activités de cette période de la vie.

Au point de vue comptable, les enfants qui rentrent en janvier sont comptés dans nos effectifs dès la rentrée. Ce n’était pas le cas avant. C’est un vrai plus. C’est quelque chose d’important dans la réforme, qui nous a donné une bonne marge de manœuvre (Les extraits sont tirés d’un entretien mené avec F. Affilé, directrice d’une des écoles du Réseau).

Le dispositif « Plus De Maître Que De Classes »

Le dispositif est très bien accepté et peut se mettre en place de façon favorable grâce à l’engagement des personnels, aux temps de formation permettant des échanges et des régulations, ainsi que de nombreux temps informels.

Les collègues souhaiteraient maintenant pouvoir faire bénéficier de ce dispositif, à la fois à la maternelle, et au cycle 3. En effet, les moyens sont concentrés sur le Cycle 2 actuellement.

https://www.sgen-cfdt.fr/actu/plus-de-maitres-que-de-classes-un-point-detape/

Le temps de formation

Les 18 demi-journées de formation inclues dans le temps de travail sont perçues positivement.

Ils permettent des temps d’échanges entre collègues, des formations adaptées aux difficultés de terrain.

Côté enseignant, la réforme, ce qu’elle a apporté c’est tout le volet concertation, formation, et ça c’est énorme. Il y a la concertation au sein de l’école, avec l’autre école du réseau et avec le collège.
Et la concertation avec les autres partenaires, par ex la petite enfance… Cela n’existait pas avant
.

Ces temps peuvent en outre être pleinement investis par les collègues uniquement parce qu’une équipe stable  de BRIGADE REP+ est mobilisée pour les remplacements.

Les autres stages de formation dont bénéficient les équipes, n’étant pas organisés de la même façon pour les remplacements, sont moins efficients. En effet l’absence des enseignants titulaires, la diversité des remplaçants et leur affectation à la dernière minute, ajoutent une difficulté supplémentaire pour la gestion de classe.

Ainsi, pour penser ces formations et temps d’échange, il convient de les penser : Dans le temps de service . Avec une équipe de remplaçants pérennes et expérimentés. Sur des objets de formation émanant des demandes des équipes. Il est préférable de favoriser les formations à la journée, avec un même remplaçant sur l’année, pour préserver l’équilibre de la classe

Ce qui est super, c’est la Brigade REP+, par journée, sinon, ce ne serait pas tenable pour l’équilibre.

Le projet de réseau

Il existe dans ces écoles et est, entre autre, porté par la coordonnatrice qui est aussi directrice d’une des écoles élémentaires. Des réunions avec les collègues du collège sont programmées sur des soirées et récupérées sur des mercredis matins.

Il y a une vraie prise de conscience et appropriation de cette idée de réseau. On peut faire du lien, dans l’idée de l’enfant, jusqu’où il va quand il est collégien

Si ces réunions peuvent être « récupérées », nous sentons que les énergies ne peuvent se démultiplier à l’infini. Une vigilance est nécessaire. Il ne faut pas brûler les étapes de co-construction, et donner le temps aux équipes.

Le personnel RASED

Le RASED est présent, ce qui est fortement apprécié des équipes.

Cependant, les personnels spécialisés se voient de plus en plus sollicités pour intervenir sur des écoles au delà du réseau. Ils aimeraient pourtant concentrer leur travail sur cette population particulièrement fragile.

On a un réseau d’aide au top du top, mais il y aurait moyen d’aider plus d’enfants. Peut-être trois fois par semaine, mais si on les prend plus, il faudra plus de monde, immanquablement.

Des équipes assez stables

Des ouvertures de classes, des décharges, des temps partiels, amènent un certain renouvèlement du personnel. Cependant, les éléments de reconnaissance pré-cités, ainsi que la reconnaissance financière, permettent, dans ces écoles, une dynamique d’engagement sur du plus long terme de la part des personnels. La notion d’entraide est au coeur de ces équipes.

Ce qui est particulier dans une école REP+ c’est l’entraide entre collègues ; En REP+ c’est juste pas possible de la jouer solo, si tu la joues perso, tu te casses la margoulette

Une demande est faîte cependant pour pouvoir titulariser des non titulaires qui souhaiteraient rester sur le poste. La stabilité de l’équipe est un véritable enjeu de réussite éducative. Cela passe par de la reconnaissance de l’engagement.

Des points de vigilance

La difficulté à obtenir une mixité sociale au delà de la maternelle.

Dans l’une des écoles, les parents des classes moyennes et supérieures inscrivent leur enfant en maternelle sans appréhension, certains de ces mêmes parents sont plus hésitants pour l’inscription en élémentaire. C’est alors la mixité sociale qui en pâtit encore aujourd’hui.

La mixité s’est fait essentiellement par le renouvellement du périmètre scolaire, avec la rénovation de Malokoff.

La situation géographique de la seconde école, enclavée dans le quartier, ne laisse aucune chance à la mixité sociale. La question du quartier est en jeu.

La mixité sociale est liée à la réalité sociale du quartier et des questions fortes devront être soulevées à ce niveau. Lorsque la mixité est un petit peu présente sur le quartier, tout le travail de l’équipe du groupe scolaire consiste à communiquer sur la confiance à accorder dans la continuité.

L’hétérogénéité, est un enjeu, mais en classe, cela se gère très bien, c’est une émulation. Moi l’énergie, elle est plus dans la gestion de l‘hétérogénéité des familles

L’école, une réalité complexe et systémique.

La taille de l’école et la multiplicité des partenaires

Ce n’est pas un paramètre négatif en soi, mais les ouvertures de classes sont à réfléchir, dans cette perspective de mixité et de cohérence d’équipe.

En outre, sur ces territoires, les effectifs des élèves sont en constante fluctuation au cours de l’année scolaire.

La prise en charge de ces publics, à besoins particuliers, demande une souplesse dans la gestion organisationnelle, avec des marges de manœuvres en temps, en espaces et en moyens humains. La spécificité de ces écoles accueillant ces publics fragiles invite à privilégier l’humain, tant dans les relations inter-professionnels, que dans les relations avec les familles ou les élèves.

En outre, les collègues, souvent très investis, s’engagent dans de multiples projets. Les partenariats sont nombreux et riches.

Tout ce pilotage, dans une structure complexe est essentiel. Il demande une grande disponibilité de la part de la direction. Le ratio nombre de classes et temps de décharge est parfois à reconsidérer. Des aides extérieures pour mener à bien les partenariats, ou les projets pourraient en outre être développées.

Garantir à chacun, et à la structure, le rythme d’évolution qui lui est propre

Les personnels nous montrent bien comment, la formation, élément fondamental de l’évolution des pratiques, et du fonctionnement pérenne de l’école, est en même temps en tension avec le maintien de l’équilibre dans la classe.

De la même façon, la directrice d’une des écoles, évoque la tension entre les propositions riches et porteuses, de travail collectif évoqués au sein du Réseau, notamment avec le collège, et le rythme de l’école, des collègues, pris dans d’autres temporalités, d’autres projets…

Il s’agit bien de prendre la mesure de ces enjeux, de favoriser l’évolution, et non le changement brutal et parfois destructeurs, ou démobilisant sur le long terme. « Partir du réel pour réussir collectivement, à faire un petit peu mieux ce que l’on n’arrivait pas à faire » (Stéphane Kus, Chargé d’étude au Centre Alain-Savary – Institut Français de l’Education, animateur du réseau national de lutte contre les discriminations à l’école)

La directrice d’école va dans ce sens en parlant de la dynamique de l’évolution des pratiques dans son école, et au sein du réseau.

Il faut leur laisser le temps de s’approprier cela. Je n’ai rien à gagner à bousculer; (…) il faut les laisser digérer. Je trouve que ce juste milieu, sur une machine plus grosse comme le réseau, il n’y pas cette dimension contextuelle qui est prise en compte.

La fonction de directeur et les temps de décharge 

Les demandes collectives appuyant les temps de décharges, la stabilité des compléments de direction, la présence d’une aide à la direction qualifiée devraient pouvoir être systématiquement pris en compte, au delà des normes comptables.

Je ne comprends pas qu’il n’y ait pas une décharge supplémentaire lorsque l’on est en REP+. (…) Il y a une surchage de travail, ça c’est sûr. (…) Et je ressens cette tension là encore plus en étant en REP que lorsque je n’étais pas en REP

Le Sgen-CFDT continuera de suivre au mieux ces équipes. Il se fera relais dans ces revendications. Nous voyons notamment que la dimension sociale liée à la mixité, la gestion humaine des personnels, et la multiplication des missions, doivent être des points à prendre en considération pour garantir la pérennité de ces dispositifs.

C’est l’existence même de ces groupes scolaires enclavés qui sera à l’avenir à questionner. Tout comme la généralisation dans toutes les écoles, de collectifs investis dans des pédagogies et des dispositifs permettant un réel accompagnement de chaque élève.

Une directrice d’école maternelle en REP + à Nantes

Les assistants d’éducation en REP+ à Nantes