Avec la Transformation de la Voie Professionnelle (T.V.P.) commencée en 2018, et les idées avancées pendant la campagne présidentielle, la question de la finalité de la voie professionnelle se pose.
finalité de la voie professionnelle
Voie professionnelle : assumer sa véritable vocation
La T.V.P. apparaît comme une réforme systémique qui prétend faire de la voie professionnelle une formation d’excellence. Le ministère a essayé d’emprunter la structuration des voies GT pour renforcer l’attractivité de la voie professionnelle :
- horaires élèves ramenés à 30h
- 2nde de détermination en famille de métiers
- spécialisation et coloration des enseignements
- atelier philosophique
La T.V.P. poursuit ainsi sa logique de rapprochement des 3 voies du lycée, amorcée depuis 2009 avec le bac pro 3 ans. Mais, il est nécessaire de conserver sa spécificité, à savoir, conduire des élèves vers des diplômes professionnalisants du CAP au bac pro.
Pour le Sgen-CFDT, il faut assumer cette spécificité. Il faut aussi affirmer que la voie professionnelle s’inscrit également dans un parcours bac-3/bac+3 qui doit donner les mêmes chances à tous les élèves.
Une finalité de la voie professionnelle dévoyée
La voie professionnelle reste souvent la solution pour les publics les plus fragiles en proie à des difficultés scolaires, sociales, de handicap, ou pour les primo-arrivants souvent allophones. Cela génère un sentiment de relégation pour ces jeunes. Ces publics, essentiellement masculin, dont plus de 80 % n’obtiennent pas le D.N.B. en fin de 3ème de collège, ou l’obtiennent sans mention, subissent donc une orientation de circonstance.
Une réalité qui propose au « rejet de l’école » de certains élèves, souvent abîmés par un système scolaire élitiste, une orientation professionnelle avec l’espoir de leur redonner confiance.
La politique de massification du système éducatif, dans une logique d’égalité des chances et d’objectif d’élévation du niveau d’étude de l’ensemble de la population, a conduit à une forme de schizophrénie dans le rôle et la place de la voie professionnelle.
Le mythe d’une voie professionnelle pensée pour apprendre un métier et s’y insérer, reste largement entretenu mais ne fonctionne pas ou très mal.
En voie scolaire, le taux d’insertion professionnel à 12 mois est seulement de 40 % pour un bac pro et seulement de 27 % pour un CAP. Plus d’un jeune sur trois n’exerce pas le métier pour lequel il a été formé. Cette inadéquation touche encore plus fortement les jeunes diplômés de la voie professionnelle.
Affichage du ministère et finalité de la voie professionnelle
Objectivement, les dispositifs pédagogiques mis en œuvre dans la T.V.P. sont ambitieux. Davantage conçus pour répondre à la réalité du public accueilli, ils s’appuient sur l’enseignement professionnel comme un levier pour tenter de rattraper les fragilités des élèves dans l’acquisition du socle commun de fin de 3ème.
Cependant, les heures pluridisciplinaires de co-intervention et de chef-d’œuvre, sensées redonner du sens aux enseignements généraux dans un contexte professionnel, bousculent et déroutent les pratiques et la culture professionnelle des enseignants.
Dans le même temps, l’insertion professionnelle reste un enjeu fort du ministère. Malheureusement, ce ne sont pas les campus des métiers, ou un apprentissage qui peine à voir le jour dans les lycées professionnels, qui vont permettre un meilleur accès à l’emploi.
Selon les personnels, au contraire, cette T.V.P. ne fait qu’éloigner la formation des attentes des entreprises :
- les référentiels métiers déclinés dans les référentiels de compétences et de connaissances sont de moins en moins atteignables
- le temps laissé pour former correctement les élèves est percuté par la diminution des heures d’enseignement
- les nouvelles conditions d’apprentissages n’arrivent pas à compenser cette perte
- l’apprentissage, soi-disant vecteur manifeste d’insertion, se développe très difficilement tant les freins et les blocages sont nombreux.
La dilution des heures d’enseignement général dans les différents dispositifs – accompagnement personnalisé, co-intervention, chef-d’œuvre – ne permet pas de proposer un accompagnement de qualité. La poursuite d’étude, envisagée par de plus en plus d’élèves (60 % d’inscription en BTS sur la plateforme ParcourSup en 2020), est un échec. En 2021, on trouve en moyenne 41 % de bachelier pro en BTS. Le tiers abandonne à l’issu du 1er semestre. C’est seulement 1 étudiant sur 2 qui obtiendra son diplôme.
C’est ce manque de perspective qui avait conduit le Sgen-CFDT à s’abstenir sur cette réforme en 2017.
La T.V.P. est une réforme bâclée
Les bonnes intentions ne suffisent pas. La mise en œuvre de la T.V.P. laisse un goût d’inachevé.
Pour le Sgen-CFDT, la situation n’est plus tenable. Elle met en tension le travail des enseignants et déboussole le sens de leurs missions jusqu’à interroger leur avenir.
En fin de 3ème, 1/3 des élèves sont orientés en lycée professionnel sur des critères essentiellement scolaires. Les personnels des lycées professionnels exercent dans un environnement de plus en plus inclusif. Il conviendrait de le reconnaître et de valoriser au lieu de l’ignorer et d’illusionner tout le monde.
Aujourd’hui, la T.V.P. est un miroir aux alouettes dont la véritable vocation n’est pas assumée politiquement.